Au Mont Ventoux

Cette année, ma virée pascale m’a conduit, sans réelle préméditation, à tenter une ascension mythique : celle du Mont Ventoux. Un truc de fou, surtout avec des bagages, mais que je recommande vivement à tous les amoureux de panoramas grandioses !

J’avais quitté Genève 8 jours plus tôt, sous une pluie battante, à destination de l’Ardèche et du Mt Mézenc, ma balade classique lorsque je n’ai pas un mois à disposition. Mon vélo connaît le chemin par cœur, si bien que je n’ai qu’à plier la tente encore givrée le matin, sauter en selle et me réjouir de traverser des contrées fascinantes, variées et silencieuses sous le soleil d’avril. Avec le vent du Nord, ça avance tout seul et à bonne allure !

J’ai donc suivi le même itinéraire que l’an passé, à quelques détails près, jusque dans les collines perdues du sud de l’Ardèche.

ViaRhona

Isère

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Ardèche

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ArdècheEnsuite, plutôt que de filer vers l’ouest et la Lozère, j’ai obliqué vers le sud-est, en direction de la Provence, visant plus ou moins la région du Ventoux, où je comptais faire quelques zigzags entre vignoble et pins odorants.

Depuis Les Vans jusqu’à Pont-Saint-Esprit, via Barjac, le trajet est sans intérêt, à l’exception peut-être du village d’Aiguèze, perché sur un éperon rocheux à la sortie des gorges de l’Ardèche.

ArdècheAttention dans le département du Gard : les routes sont souvent dangereuses et les conducteurs parmi les plus irrespectueux de France.

On se réjouit donc de traverser la vallée du Rhône, sans encombre, et d’entrer dans le Vaucluse. Au passage, je n’ai pas manqué de céder à deux de mes petites addictions : regarder passer quelques TGV lancés à pleine vitesse et prendre quelques photos de l’A7 complétement bouchée en direction du sud – trop cool, vraiment, les congés passés le cul dans sa bagnole bloquée dans un bouchon !!!

A quelques centaines de mètres de ce spectacle de fin du monde, une petite route déserte et silencieuse quitte Mondragon pour monter dans le vignoble des Côtes du Rhône. C’est magnifique jusqu’à Rochegude, un peu moins ensuite jusqu’à Vaison-la-Romaine – attention au trafic sur le tronçon de la D975 entre Roaix et Vaison, prendre la piste cyclable à droite avant l’arrivée à Vaison.

VaucluseAu-delà de Vaison, une petite route le long de l’Ouvèze permet d’éviter la D938 et de poursuivre sans danger vers Malaucène, via Entrechaux. C’est au camping de Malaucène qu’un cycliste allemand m’a convaincu que je ne pouvais pas décemment contourner le Mt Ventoux sans en tenter l’ascension. Lui-même redescendait tout juste de la route nord, encore bloquée avant le sommet à cause de la neige – la seule alternative restait donc la route sud, au départ de Bédoin. Et pas question de laisser les bagages au camping, puisque la boucle est impossible. Quant à revenir par le même chemin, cela ne fait pas partie de mes options.

Levé tôt, j’ai donc plié la tente, chargé le vélo et filé vers Bédoin, franchissant d’abord le modeste col de la Madeleine sur une route magnifique à flanc de coteau et parmi les pins, avec la silhouette du « Géant de Provence » en ligne de mire.

Mont VentouxA mesure que j’approchais de Bédoin, il y avait de plus en plus de cyclistes. Au village, j’ai acheté un sachet de raisins secs, une bouteille de Coca (du sucre, rien que du sucre – berk !) et suis reparti, m’arrêtant de temps à autre pour humer le parfum envoûtant des cerisiers en fleurs et observer la montagne grandissant au fur et à mesure de mon approche.

C’est après un virage en lacet, à la sortie du hameau de Les Bruns/St-Estève, que les choses sérieuses commencent. La route se rétrécit tandis que la pente s’accentue : les passages à 9% ou plus seront nombreux jusqu’au sommet.

Mont Ventoux

Mont VentouxLes divers sites internet que j’ai consultés au retour ne donnent pas les mêmes valeurs de profil et de pente, alors laissons tomber ces chiffres. Ce qui est sûr, c’est que ça monte dur pendant longtemps. Avec mon vélo pesant une quarantaine de kilos en raison des bagages, je me suis arrêté de nombreuses fois pour me reposer à l’ombre et engloutir raisins secs, barres de céréales, morceaux de sucre et chocolat.

La densité du trafic cycliste est un énorme avantage de cette ascension : les véhicules motorisés (relativement peu nombreux en ce dimanche ensoleillé) sont avertis et ralentis, et représentent par conséquent un danger moindre que sur bien d’autres cols.

Au Chalet Reynard (1420 m), je me suis offert une bonne bière et en ai profité pour demander si je pouvais laisser mes bagages dans un coin le temps de faire l’aller-retour vers le sommet. J’ai ainsi terminé l’ascension avec un vélo moins lourd, ce qui m’a permis de profiter davantage de cet environnement exceptionnel, clair, pelé, pierreux et du panorama hallucinant qui m’entourait.

Mont Ventoux

Mont Ventoux

Mont Ventoux

Mont Ventoux

Mont VentouxAprès une demi-heure au sommet, il était temps d’enfiler une polaire et un coupe-vent pour me lancer dans une longue descente de plus de 25 km jusqu’à Sault, où je comptais passer la nuit. Dans l’autre sens, c’est un nouveau panorama extraordinaire qui s’offrait à mon regard et j’ai dû souvent résister à l’envie de m’arrêter pour prendre une photo – mais quand on est lancé à 40 km/h ou plus (je contrôle sévèrement ma vitesse sur ce vélo âgé de 15 ans et chargé), c’est moins évident de s’arrêter qu’à la montée…

Mont VentouxAprès avoir récupéré mes bagages au Chalet Reynard, j’ai donc pris la route de Sault qui est comme ma carte le laissait prévoir beaucoup moins raide que celle de Bédoin. J’étais content de pouvoir laisser rouler le vélo sans devoir être cramponné sur mes poignées de freins – je n’aurais pas aimé descendre d’où je venais ! A la sortie de la forêt, on longe des champs de lavande, avant de traverser la Nesque et de remonter vers le joli village de Sault perché sur le rebord d’un plateau.

Mont Ventoux

Mont Ventoux

Le lendemain, j’ai retrouvé la Nesque et l’ai suivie à travers les gorges du même nom : un parcours magnifique d’une trentaine de kilomètres en descente jusqu’à Villes-sur-Auzon. C’est assez incroyable de constater la profondeur de ces gorges creusées dans la roche par ce qui n’est plus aujourd’hui qu’un modeste ruisseau, en outre pratiquement à sec lorsque je suis passé. Les voitures sont rarissimes sur cette petite route, mais on croise d’innombrables cyclistes qui s’en vont sans doute faire le Ventoux.

Mont Ventoux

Plus loin, la montée depuis Venasque jusqu’au modeste Col de Trois Termes, sur le Plateau de Vaucluse, nous replonge dans un environnement de défilé rocheux avant la descente vers Gordes et la vallée du Calavon.

Vaucluse

Alors qu’il n’y avait presque personne sur la route depuis des kilomètres, on croise de plus en plus de bagnoles, camping cars et autres cars remplis de touristes à mesure que l’on approche de Gordes, magnifique village accroché à son flanc de colline. Magnifique, sans doute, mais village-musée où tout tourne autour de l’obsession de piquer du fric aux touristes qui débarquent par troupeaux entiers : cafés et restos en surnombre, boutiques de luxe ou de pacotille, galeries « d’art », ateliers de céramique, etc. Et évidemment, rien à bouffer pour ton budget. Cycliste amoureux d’authenticité, passe ton chemin !

VaucluseJe souhaitais terminer cette balade par un circuit autour de la montagne du Lubéron, où je n’étais jamais venu. Arrivant de Gordes, j’ai décidé de rouler sur le versant nord du petit Lubéron, de traverser la montagne entre Bonnieux et Lourmarin (autre village-musée), puis de parcourir le versant sud du grand Lubéron.

J’ai pris les petites départementales au pied de la montagne, bien plus attirantes a priori que la Véloroute du Calavon, toute neuve et toute droite, longeant, souvent à proximité immédiate, la D900. Je ne garde toutefois pas un souvenir impérissable de ce « huit » ouvert autour du Lubéron, mais j’ai bien apprécié le petit camping de Bonnieux avec ses cerisiers en fleurs, ma halte pique-nique à l’ombre sur le muret au bord de l’étang de la Bonde (mon thermomètre a mesuré 40°C ce jour-là) , ainsi que le silencieux col de l’Aire Dei Masco. Il est sans doute plus intéressant de parcourir le modeste Lubéron à pied qu’à vélo, mais selon ce que des randonneurs/VTTistes m’ont raconté, il faut être préparé à chercher souvent son chemin (balisage très approximatif), et à affronter ronces et caillasse sur des sentiers peu ou pas entretenus…

Vaucluse

LubéronAu gîte communal de Céreste, j’ai croisé un couple qui marchait vers Rome – ma destination probable pour cet été. La météo annonçait une dégradation pluvieuse pour le surlendemain et je devais par conséquent penser au retour. Sisteron, à une centaine de kilomètres de Céreste, m’est alors apparu comme une bonne option : j’y prendrais le train pour Grenoble, puis Genève.

Restait à s’y rendre. Sur la carte, le col de l’Homme Mort m’a interpellé et j’ai donc décidé de remonter plein nord jusque-là, avant de bifurquer vers l’est et de descendre la vallée du Jabron. En chemin, j’ai apprécié le hameau perché d’Oppedette, ainsi que les gorges du même nom.

Alpes de Haute-ProvenceJ’ai bien aimé aussi Simiane-la-Rotonde et sa boulangerie bienvenue au bord de la route, puis les tronçons tout droits sur le plateau d’Albion. Un peu plus loin, un (presque) vieil ami s’est à nouveau profilé dans mon champ de vision : le Ventoux !

Mont VentouxLa montée au col de l’Homme Mort commence à Ferrassières, probablement le village le plus méridional de la Drôme. Ici encore, il n’y a personne sur la route, et la pente reste modeste – mais quand je suis passé il faisait chaud, même en avril.

Mont VentouxDans la descente derrière le col, on a une belle vue sur la face nord-est du Ventoux et j’en ai profité pour lui faire mes adieux.

Mont VentouxL’environnement a changé : il est ici beaucoup plus aride et je me dis qu’il faudra que je revienne un jour faire des tours dans ces régions préalpines du sud-est de la Drôme.

Après une brève remontée au col de la Pigière, je me suis lancé dans la longue descente vers Sisteron, par la vallée du Jabron, qui offre en certains endroits de beaux coups d’œil sur le versant nord apparemment escarpé de la montagne de Lure.

Alpes de Haute-ProvenceDurant toute cette journée, je n’ai croisé que quelques voitures avant d’approcher la vallée de la Durance, où le trafic a augmenté. C’était magique. Et une petite ville comme Sisteron, avec néanmoins gare et camping, c’est juste le pied pour la fin d’un voyage.

Alpes de Haute-ProvenceLe lendemain matin, j’étais dans le train pour Grenoble puis Genève, sous un ciel bas et tout gris, qui n’a pas tardé à lâcher de puissantes averses…

La carte de cet itinéraire et les infos pratiques se trouvent ici.

2 réflexions sur « Au Mont Ventoux »

  1. Merci Raphaël, ça fait rêver!
    A défaut de m’être lancée moi-même sur de grands chemins en ce début d’année, j’ai adoré lire ton compte-rendu et sourire aux charmes de la France, si bien révélés par tes photos.
    Le Mont Ventoux, je ne m’y suis jamais intéressée de près, mais le paysage totalement hors de commun que tu montres donne envie de tenter le défi; bon, sauf qu’à mon niveau je me contenterai de planifier la chose sans les bagages et sans la bière à mi-pente. A part ça il se pourrait qu’un jour je m’inspire de cet itinéraire ou d’une portion, ton article sera alors fort utile en plus d’avoir été agréable!
    Encore plus inspirante et merveilleusement attirante, pardon si je sors du sujet, l’île de Hoy dont tu as intégré quelques vues à ton diaporama. Quelle beauté! On dirait que ces lieux n’ont jamais été foulés du pied de l’homme. Dans la réalité le spectacle est-il aussi fascinant que le laissent imaginer tes photos? Mérite-t-il d’engager le voyage compliqué pour se rendre jusque là-bas? (J’ai bien repéré les indications pour les transports après ton récit de ce voyage, mais aurais été curieuse de lire tes impressions sur cet endroit qui paraît tellement extraordinaire…)
    En te remerciant encore pour les belles images, les témoignages, et les idées plus que politiquement correctes que tu proposes en partage sur ce site, je t’envoie d’amicales salutations.
    Florence

    • Salut Florence et merci pour ton message.
      Le Mont Ventoux est vraiment un endroit exceptionnel : ça vaut la peine d’y monter, même sans prendre une bière, même à pied, si le défi cycliste te semble exagéré. J’imagine qu’il y a de chouettes sentiers pédestres tout autour.
      Ceci dit, je reste bien plus attaché à la rudesse et à l’authenticité de l’Ardèche et du Massif central qu’aux contorsions provençales pour appâter et séduire le tourisme de masse. Tu pourras néanmoins te lancer en toute confiance sur n’importe quelle portion de cet itinéraire, si l’envie te prend.
      Pour le reste, je te confirme que Hoy est, en Europe, l’un des lieux les plus magiques où je sois passé. C’est encore plus beau que les photos. Mais je ne sais pas ce que ça donne sous la pluie…
      J’espère bien trouver le temps de terminer l’article sur cette route-là au plus vite, et donc d’écrire un peu sur les Orcades, mais je n’ai jamais une minute et en suis pour l’instant resté plus ou moins au milieu du voyage de l’été dernier.
      Je ne peux que conseiller d’aller faire l’Écosse à vélo. Ce n’est pas mon genre de faire de la pub pour l’avion, mais je pense que ça peut être une solution pour ceux qui ne veulent pas pédaler jusque là-bas : vole vers Inverness, roule jusqu’aux Orcades (2-3 jours), explore les Orcades, et pourquoi pas aussi les Shetlands. Enfin, la côte ouest de l’Écosse est également très belle. Mais gare aux midges !
      Amicalement

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