Grand Raid 2017

Comme l’an passé, la prévision météo pour la course du 19 août a été l’objet de beaucoup d’attention de la part des coureurs et des organisateurs dans la semaine précédente. Grâce au blog de Frédéric de MétéoNews, nous avons passé par tous les stades, de l’enthousiasme à l’appréhension, étant donné qu’à un certain moment tous les modèles annonçaient le déluge… Pour tenir compte des dernières prévisions, les départs ont été retardés de 30 minutes et nous avons finalement bénéficié d’un temps plus clément qu’en 2016.

Grand Raid

Ce n’était pas gagné d’avance : je me suis réveillé au milieu de la nuit à cause du bruit de la pluie battante sur le toit et de quelques coups de tonnerre. Au même moment, d’après ce qu’on m’a raconté, les bénévoles qui passaient la nuit au Pas de Lona afin d’accueillir les premiers coureurs d’Évolène ont dû filer se réfugier à la cabane des Becs de Bossons, située à une vingtaine de minutes à pied – dans l’orage et la pluie à près de 3000 mètres d’altitude, je ne crois pas que j’aurais apprécié…

Les météorologues avaient néanmoins vu juste : lorsque je me suis levé à 5 heures, il ne pleuvait plus. Bien sûr, les nuages collaient aux flancs des montagnes, mais la température était tout à fait idéale pour la course avec une douzaine de degrés au départ.

Pour cette troisième participation, j’étais dans le groupe de tête devant la ficelle et après un départ prudent sur le chemin graveleux et détrempé jusqu’à Mâche, j’ai appuyé dans la montée vers Riod, lâchant le peloton et roulant tout seul (quelques pros étaient déjà plus loin en avant). Un peu éprouvé par ce début rapide, j’ai relâché l’effort sur la jolie piste forestière menant au ravitaillement de Praperrot, où j’ai avalé 2 cocas en prévision de la montée vers Mandelon. Pendant ces quelques secondes d’arrêt, j’ai été dépassé par un bon nombre de participants qui avaient dû accélérer après la montée de Riod et rouler très vite sur la piste quasiment plate.

Plus question donc de rouler seul, et attention aux glissades sur le petit pont de bois traversant la Dixence – le public et les bénévoles qui nous prévenaient ont dû assister à quelques chutes.

Dans la belle et paisible montée sur le goudron, on rattrape quelques filles, parties quinze minutes avant nous. Elles ne sont pas si nombreuses dans la course (90 pour 1524 hommes, tous départs confondus), alors j’aime leur dire bonjour en passant, quand c’est calme – pas dans la caillasse ou la descente !

La veille, comme beaucoup d’autres participants, j’avais scotché sur mon cadre les temps réalisés en 2016 pour chaque étape. Ainsi, en arrivant au ravitaillement de Mandelon, je savais qu’il ne me fallait pas traîner – je suis reparti avec une minute de retard (le portique de chronométrage est situé après le ravitaillement).

Après les pluies diluviennes de la nuit, le parcours était évidemment détrempé entre l’alpage de Mandelon, celui de Vendes et Chemeuille – mais je m’attendais à pire dans ces coins argileux où l’eau a de la peine à s’infiltrer et avais d’ailleurs monté des pneus plus « accrochants » que l’an passé : un Continental X-King neuf à l’avant et un Schwalbe Racing Ralph en bon état à l’arrière. En outre, avec un dossard « 5000 » et si on ne traîne pas, on bénéficie de chemins pas encore trop défoncés.

Ceci dit, les pneus glissent sur les pierres mouillées, donc on pousse certainement plus souvent que par terrain sec, et mieux vaut faire attention où l’on met les pieds si l’on veut les garder plus ou moins secs en ce début de course. Côté ciel, que des bonnes nouvelles : il n’est pas tombé une seule goutte depuis le départ et le soleil fait de belles apparitions.

Grand RaidA Chemeuille, je m’arrête un instant pour enfiler un gilet polaire en prévision de la longue descente vers Evolène et un coureur me demande si j’ai une clé Allen tout en me montrant sa selle qui s’est détachée à la suite d’une chute près de Mandelon. Je lui prête mon outil et abandonne entre 4 et 5 minutes à cet endroit, alors que j’ai déjà du retard. Malheureusement, la réparation ne tiendra pas et je dépasserai ce cycliste un peu plus bas, après que sa selle se soit de nouveau détachée et qu’il ait sans doute cette fois-ci en plus perdu les vis…

Une partie de la route a été goudronnée au-dessus de Lanna, donc on gagne un peu sur cette courte section. Pas assez quand même, puisque je quitte le ravitaillement festif et populeux d’Évolène avec 6 minutes de retard.

Le tronçon suivant comprend la montée vers Volovron (env. 400 m de D+), le single très rapide jusqu’à Chandolin, puis la montée courte mais raide à travers le pâturage jusqu’à Eison. C’est un peu mon tronçon fétiche, puisque j’y réalise à chaque édition le meilleur « score » de tout le parcours : 10e sur 86 cette année (43e sur 212 en 2016 et 90e sur 290 en 2015).

Grand RaidGrand RaidMais ça ne suffit pas, d’autant plus que comme parents et neveux sont venus m’encourager à Eison, je traîne plus au ravitaillement et en repars avec 7 minutes de retard…

Sur la longue et belle montée vers l’A Vieille, même si tout se passe bien, j’avance moins vite que l’an dernier. Cela ne me dissuade toutefois pas de m’arrêter pour me ravitailler : un peu de banane, un verre de bouillon, un de coca, une barre Isostar et le plein de boisson isotonique pour ma petite gourde d’un demi-litre – que je ne finirai à aucun moment de la course, me contentant pratiquement de boire aux ravitaillements. Je profite de l’arrêt pour mâcher mon 3e et dernier cube énergétique « Bloks ». Et redémarre avec 10 minutes de retard pour l’étape la plus folle : la montée au Pas de Lona.

Après quelques centaines de mètres roulants, il faut pousser le vélo en raison de la pente et/ou de passages creusés/encombrés de gros rochers. Le sentier se dédouble parfois, ce qui permet éventuellement de dépasser. Ayant un peu forcé l’allure pour tenter de rattraper mon retard, je ressens pour la première fois une crampe naissante dans ma jambe droite. J’ai d’abord de la peine à y croire car c’est totalement inédit, mais je suis rapidement obligé de ralentir, tout en espérant que la crampe ne viendra pas. Je tente également quelques massages rapides des muscles concernés, pour les détendre. Et finalement ça marche : je peux repartir sans dommage à l’assaut du Pas de Lona.

On monte pratiquement en file indienne et les possibilités de dépasser sont très rares : il n’y a pas toujours deux sentiers et il faut beaucoup d’énergie pour accélérer dans une telle pente, malgré la fatigue accumulée. Parfois, celui de devant sent que son poursuivant est plus rapide et stoppe un instant pour laisser passer. Depuis un moment, on entend bourdonner les hélicos et vrombir les motos : pas de doute, les champions de Verbier approchent. L’an dernier, Urs Huber m’avait dépassé dans les derniers mètres du Pas de Lona.

Grand RaidPrès du sommet, on chemine entre deux rangées de spectateurs enthousiastes qui nous encouragent tous avec la même vigueur. Cela me donne la force de dépasser presque en courant le gars qui porte son vélo devant moi et me ralentit depuis un bon moment. J’arrive en haut dans un état à mi-chemin entre euphorie et épuisement, avale deux verres de thé froid et me lance avec encore 8 minutes de retard dans les roues de Porro et Ragnoli, les Italiens en tête de la course de Verbier – Urs Huber a chuté au-dessus d’Évolène et s’est cassé la clavicule.

Bien sûr ils me distancent vite, mais j’ai le plaisir de rouler seul dans la descente vers les lacs de Lona tout en observant, dans les passages les plus faciles, la voltige de l’hélico qui suit de très près les leaders (prise de vue pour le direct de la RTS ?) et évolue de fait en-dessous de moi !

Grand RaidDernier effort assez douloureux dans la montée (pas longue, mais raide et caillouteuse) vers le Basset de Lona, point culminant de la course à 2792 m, où des (grands) enfants joyeux et insistants me tendent des boissons au passage. Mais pas question de s’arrêter une seconde et je leur crie moult remerciements sans saisir aucun gobelet.

Ne reste que la descente. « Que » ? Non, ce n’est ni un détail ni partout une partie de plaisir, en raison de nombreuses sections très caillouteuses et donc potentiellement dangereuses en cas de chute. Et puis en certains endroits, si on fait le plongeon, c’est tout droit dans les eaux… (couleur magique mais indéfinissable pour un daltonien) du lac de Moiry…

Grand RaidGrand RaidIl faut donc rester vigilant en dépit de la fatigue et de l’envie d’arriver au bout de l’épreuve. Une partie de la piste au-dessus du barrage a été « lissée » au rouleau compresseur et on peut y rouler plus vite qu’avant. Au pied du barrage, on nous fait faire un détour par un vrai dévaloir rocheux pour ne pas traverser la route et je préfère pousser le vélo.

Arrivé juste devant le premier gué traversant la Gougra, je constate qu’il y a beaucoup d’eau et passe à pied sur les grosses pierres. Par contre, je franchirai les deux ou trois (?) suivants en selle au prix de bonnes douches bien fraîches. Je me souviens avoir découvert en face de moi, entre les 2 vagues de la gerbe d’eau que j’ai soulevée à l’un de ces passages, l’objectif d’un photographe, mais n’ai hélas retrouvé nulle part cette image qui doit être bien cool.

Grand RaidGrand RaidGrand RaidUn peu plus bas, sur la piste caillouteuse qui conduit à Grimentz, on nous fait ralentir à cause d’une chute. Un cycliste est couché au sol et les sauveteurs arrivent en courant. J’espère que ça n’était pas grave.

Après le dernier pont, il faut foncer pour gravir un raidillon situé juste avant la tente d’arrivée. Deux mètres derrière le chrono, un gros attroupement avec caméras bloque quasiment le passage : je trouve cela assez dangereux et me demande pourquoi on ne fait pas les interviews à l’écart du canal d’arrivée… Ah, la tèlè, quand même !

Après m’être faufilé à travers tout ce petit monde, je vais immédiatement faire la queue à la station de lavage, car je ne veux pas traîner à Grimentz : trop de foule, trop de bruit, trop de pub. Je suis donc impatient de ré-enfourcher mon vaillant destrier libéré de sa gangue de boue pour filer, à vitesse réduite (!!!), sur la jolie piste forestière silencieuse menant à Vercorin, m’arrêtant ici ou là sur un banc solitaire pour contempler la vallée, me reposer et aussi me réjouir d’une belle performance : parvenu à Grimentz en 6h32, j’aurai finalement amélioré mon temps de 7 minutes et donc récupéré plus de 17 minutes depuis l’A Vieille. Cool !

Grand RaidCe résultat me classe au 22e rang sur les 86 participants de ma catégorie. Après analyse des différents chronos qui démontrent comme d’habitude mes meilleures compétences à la montée qu’à la descente, je suis particulièrement content de mon 12e rang (toujours sur 86) à l’Étape, avec un grand « E » : le Pas de Lona !

Une fois de plus, l’ambiance de la course a été magnifique, grâce au public enthousiaste, aux bénévoles, ainsi qu’au beau fair-play qui règne sur le parcours entre les participants – même les champions disent merci lorsqu’on les laisse passer. Dans les descentes, les plus rapides annoncent leur dépassement (« à gauche »), ce qui permet d’éviter des collisions. Dans les montées, généralement silencieuses, il arrive qu’on échange quelques mots avec ceux qui se trouvent à proximité, dans le même effort…

Retrouvez ce magnifique parcours ici, balisé à l’année sur le terrain. Profitez-en !

A l’année prochaine,

Matricule 5012

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